Les Vipères et la baguette de virginité
V.

Asthik, rentrant après le fabuleux concert de Firesperm, avait oublié qu'il avait laissé chez lui une grenouille en pleine transformation. Sur le chemin, il s'en souvint et se posa mille questions. Très vite, l'impatience le gagna et c'est au pas de course, élégamment comme toujours,  qu'il fit le reste du chemin. Il sema le vieillard complément défoncé,  qui le suivait avec le secret espoir d'être invité à gouter aux plaisirs de sa chair. Le vieillard pris conscience que mémoire retrouvée ne signifie pas jeunesse retrouvée, il reprit alors le chemin de son logement collectif, entre vigueur et résignation, rejoindre une ou deux poulettes de son âge.

Asthik retrouva à son arrivée, un homme grand et blond, nu, étendu sur le sofa. C'était un prince-très-charmant. Il avait le visage carré, le torse sculpté et possédait des attributs forts appétissants. Il dormait, totalement abandonné aux bras de Morphée. Asthik était heureux, c'était absolument ce dont il avait besoin en ce moment. Il s'approcha doucement du prince-très-charmant, doucement, pour l'admirer de plus près, de plus en plus près, jusqu'à effleurer la peau du bel hidalgo ensommeillé. Un frisson parcouru l'échine du prince-très-charmant et les premier signes de son réveil purent se lire sur son corps chaud. Asthik sourit et le prince aussi...

Le temps s'écoula vite ou lentement, cela dépend de comment on le prend mais il passa aussi surement qu'une envie de Mont Blanc.

Au réveil, Asthik était fébrile. Il avait hâte de présenter son prince-très-charmant à tous ses amis. Ils avaient passé beaucoup de temps serrés l'un contre l'autre à se découvrir sans se parler étant donné qu'ils avaient souvent la bouche pleine de mots qu'ils ne pouvaient pas dire. Leurs seuls échanges vocaux se résumaient en une série de râles d'intensité variée. Une pensée fugace traversa la tête d'Asthik. Un doute persistait, une angoisse pointait le bout de son nez mais Asthik chassa tout ça d'un mouvement de tête. 8H30. Il prit son téléphone pour appeler Sexysperma, en prenant une pause à la Lady Gaga. Il fallait mettre ses amis au courant au plus vite, même si sa gorge le faisait un peu souffrir à cause de l'exercice qu'il s'était offert toute la nuit.
- Hey Sexy !
- Salut moumoune, répondit Sexysperma la voix encore endormie, ça roule?
- Ça roule bien putain !!! J'ai eu une super surprise en rentrant.
- Ah oui ?  Sexy se sentait intriguée malgré les relents d'alcool qui lui embrumaient le cerveaux.
- Oui. Tu sais la grenouille, elle s'est transformée en un prince-très-charmant et on a baisé comme des fous toutes la nuit.
- Non !
- Si !
- Dis m'en plus. Je veux savoir.
- Ben... on a commencé par se...
- Non, ce n'est pas ça que je veux savoir, le coupa Sexysperma. Il a un nom ce nouveau venu?
- A vrai dire... on a pas encore vraiment parlé, c'est malpoli de parler la bouche pleine si tu vois ce que je veux dire...
- Oui, je vois bien.
- Là, je vais me recoucher un peu mais je crois qu'il serait bien que ce soir on se retrouve autour d'une ou deux bouteilles de vin blanc pour que je le présente à tout le monde.
- Je m'occupe d'alerter tout le monde, après tout c'était le cadeau commun que nous t'avons offert.
- Super Sexy, à toute alors.
- A toute.

Sexysperma raccrocha son combiné téléphonique, interloquée mais heureuse pour son ami. Il était tôt, elle se rendormit en se faisant un listing mental des Vipères à prévenir et reprit le cours de son rêve doux et coloré où il était question d'amour de gloire et de beauté.

Interlude

Pendant ce temps, le vieillard avait réussi à pénétrer la maison de retraite dans laquelle il logeait habituellement.
Doucement, sur la pointe des pieds qu'il avait très grands, il passa dans les couloirs comme une ombre fantomatique au milieu de la nuit. Il avait retrouvé son agilité de chat et comptait bien en profiter. Il s'introduisit dans la réserve et versa les restes de drogues, qu'il avait volé discrètement, au cours de la soirée qui avait changé le cours de sa vieillesse, dans les bonbonnes d'eau et les carafes de vin, les légumes surgelés et la purée en poudre qu'ils mangeraient tous demain. Avant d'aller se coucher, comme si de rien n'était, il fit un petit détour dans la chambre de Gertrude, sa voisine de palier à la poitrine lourde et aux cheveux violets. Il lui restait quelques gouttes de GHB, qu'il avait précieusement gardées. Gertrude dormait la bouche ouverte comme à son habitude depuis des années. Le septuagénaire fit tomber  trois gouttes du précieux liquide dans la bouche offerte de la vieille endormie. Il attendit quelques minutes, le temps que le produit fasse son effet, et lui donna un baiser tendre et langoureux comme à ses 20 ans.

Gertrude lui rendit son baiser et l'attira tout contre elle, la tête entre ses seins généreux en lui susurrant tendrement à l'oreille :

« Baise moi, mon beau trouvé. Baise moi jusqu'à la mort qui n'a que trop tardé. Baise moi même si je ne suis pas fardée. Baise moi mon beau trouvé et fais moi chanter les temps oubliés. Fais moi pleurer, fais moi crier et me rappeler. Une dernière fois, je veux aimer comme jamais je n'ai rêvé, comme toujours je l'ai désiré. Baise moi, mon beau trouvé. Baise moi jusqu'à la mort qui n'a que trop tardé. »

Les larmes coulaient sur leurs visages ridés, mais cette fois-ci ce n'était pas parce qu'on les avait oubliés mais parce qu'ils se souvenaient du goût de l'éternité.

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